La victoire de Jules César sur Vercingétorix en 52 av.J.C. change le destin de la Gaule. En se romanisant, elle adopte une organisation administrative et militaire qui lui faisait défaut, tout en gardant certaines caractéristiques qui lui sont propre, son héritage celte.
Le latin, la langue des nouveaux maîtres du pays s'impose. Mais les années, les siècles passent et cette langue évolue sous l'influence du gaulois puis du francique.
Voici un exemple d'un mot latin moneta qui va, à force de transformation donner le mot monnaie.
La petite histoire d'un mot, c'est l'histoire d'une langue, l'histoire d'un peuple.
Le mot moneta a été créé à partir du verbe monere qui signifie "faire penser, faire se souvenir", et "avertir" ou "conseiller", et qui a d'abord été un nom propre : Moneta était le surnom de la déesse Junon, l'épouse de Jupiter, le roi des dieux; Junon Moneta, c'est à dire Junon la "Conseillère" ou "Celle qui avertit". Et voici pourquoi, d'après Ciceron (homme politique et auteur latin du 1er siècle avant J.C.) : durant un tremblement de terre, les Romains entendirent une voix s'élever du temple de Junon, sur la colline du Capitol, à Rome; cette voix les avertissait du danger, et leur conseillait d'offrir des sacrifices aux dieux pour les apaiser. C'est ainsi, d'après cette légende, que le surnom de Moneta fut attribué à Junon.
Reine du Ciel, déesse du Mariage, Junon était donc honorée, à Rome, dans un temple qui se dressait sur la colline du Capitol. C'est dans l'enceinte de ce temple que fut installé, au début du IVèsiècle avant J.C., le premier atelier de frappe, de fabrication de pièces de monnaie romaines, activité qui se trouva ainsi placée, dès l'origine sous la protection de Junon Moneta. Et les Romains prirent l'habitude d'employer le nom de Moneta pour désigner, aussi, le temple de la déesse, puis les petites pièces de métal qui étaient produites dans l'atelier du temple : c'est ainsi que le mot moneta est devenu un nom commun en latin, et a pris le sens courant de "monnaie".
La moneta latine est devenue en français, de la monoie, puis de la monnoye, et enfin, au XVIè siècle, de la monnaie.
Revenons au verbe monere : outre moneta, plusieurs autres mots latins en sont dérivés, comme monitio, le "conseil", "l'avertissement", et praemonitio, "l'avertissement préalable" (puisque prae signifie à "l'avance" en latin), qui a donné en français prémonition et prémonitoire. Une prémonition est un préssentiment, un avertissement inexplicable qui nous révèle à l'avance un événement, lors d'un rêve prémonitoire, par exemple.
On trouve aussi, en latin, le verbe admonere, "donner un avertissement", qui a abouti en français, à admonester, "réprimander en donnant un avertissement". Et le monitor, qui en latin était un "conseiller", un "guide" ou un "instructeur", est l'ancêtre de notre moniteur. Enfin, il y a le monumentum...
Les Romains donnaient le nom de monumentum à tout ce qui servait à rappeler le souvenir (de quelqu'un ou de quelque chose), et notamment à perpétuer la mémoire d'un mort : stèle, inscription, statue, tombeau... C'est d'ailleurs avec le sens de "tombeau" que le mot monument, issu de monumentum, a d'abord été utilisé en français, avant de désigner plus généralement un ouvrage d'architecture ou de sculpture, commémoratif ou non.