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5 septembre 2012 3 05 /09 /septembre /2012 06:54

            Vercingétorix

 

     Chapitre XVII - Alésia.

 

3. Commencement du blocus ; construction des camps et des redoutes romaines.

 

César reconnut, à l’examen, que la situation d’Alésia appelait le blocus, l’imposait presque comme la solution la plus certaine et la moins sanglante. Son premier mot fut pour dire aux soldats qu’il fallait travailler : il ne s’agissait point de brandir des épées, mais de remuer la terre à grandes pelletées.

Alors commença la plus énorme besogne de terrassement qu’un imperator eût, depuis Marius, ordonnée à des légionnaires, citoyens romains. Il fallait creuser et bâtir, tout autour de la montagne d’Alésia, sur un circuit de onze milles (seize kilomètres) : mais César avait sous ses ordres, pour mener l’œuvre à bonne fin, quarante mille hommes, la plupart vieux soldats aux muscles robustes et aux gestes exercés.

Sa première tâche fut de tracer et de fortifier les camps. Il en établit quatre (?), tous sur les hauteurs qui faisaient face à Alésia : deux (?) au Sud, sur la montagne de Flavigny, et c’est sur ce point sans doute que se trouvait le quartier général ; un au Nord-Est (?), sur la montagne de Bussy ; un quatrième enfin au Nord-Ouest, en contrebas du Mont Réa : ce dernier, où s’installèrent deux légions, fut le seul qui ne s’élevât pas à la même hauteur qu’Alésia ; car sur ce point, le sommet des collines extérieures était trop éloigné pour être compris dans la ligne de blocus : César se contenta de dresser le camp à mi-côte.

Pour relier ces camps et préparer la contrevallation, il décida de construire, sur la même ligne, une série de redoutes, distantes l’une de l’autre d’à peu près un demi-mille, et assez grandes pour abriter quatre cohortes, seize cents hommes : il y en eut vingt-trois, presque toute l’armée pouvait s’y tenir en position de combat ; la nuit, on y veillait sans relâche ; le jour, on y postait des garnisons, prêtes à sortir pour protéger les travailleurs.

Ce furent les premiers travaux. Alésia n’était pas bloquée, mais surveillée de très près. Les camps et les redoutes étaient les jalons qui marquaient l’enceinte dont elle allait être bientôt entièrement investie. Elle voyait surgir tout autour d’elle, à douze ou quinze cents mètres de ses murailles, une cité ennemie, qui avait déjà ses tours et ses citadelles, et qui ne tarderait pas à avoir ses remparts continus, enveloppant les siens propres.

 

4. Nouvelle défaite de la cavalerie gauloise dans la plaine des Laumes.

 

Le seul endroit où les Gaulois pussent entraver les terrassements romains avec quelque chance de succès était la plaine des Laumes. Sur ce point les légionnaires travaillèrent longtemps sans abri, hors de la protection de leurs collines, sur des espaces découverts et peu propres à recevoir des camps et des redoutes. Ce secteur des lignes d’attaque était, par sa position, le plus faible : c’était donc celui où il importait le plus à César de pouvoir agir à sa guise.

Aussi Gaulois et Romains s’appliquèrent-ils également à devenir ou à demeurer les maîtres de la plaine des Laumes. Vercingétorix y déploya ce qui lui restait d’escadrons, en nombre encore suffisant pour résister fermement aux ennemis ; et malgré le désastre des jours précédents, il ne parut pas que le courage de ses hommes fût ébranlé.

Une nouvelle bataille s’engagea entre la cavalerie gauloise et la cavalerie proconsulaire,153.jpg et l’affaire fut presque aussi chaude que la dernière. Les Romains faiblirent les premiers, et César craignit un instant que l’infanterie ennemie ne vînt à la rescousse. Il dut faire sortir ses propres légions pour que leur vue donnât du coeur aux siens, et il lança à leur secours la masse des cavaliers germains. Pour la troisième fois, ceux-ci sauvèrent l’honneur de l’armée. Les Romains furent raffermis, et les Gaulois tournèrent bride devant leurs sauvages ennemis.

Ils s’enfuirent par les vallons (surtout de l’Ozerain ?) jusque vers leur camp. Ils pensèrent se trouver pris entre les légions qui s’avançaient, les Germains qui galopaient, l’enceinte de leur boulevard, percée d’ouvertures trop étroites. Les uns s’écrasaient aux portes, les autres abandonnaient leurs chevaux pour franchir le fossé et escalader les murailles. Il y eut quelques minutes où les Germains purent se donner la joie d’un grand massacre. Les Gaulois du camp finirent par craindre pour eux-mêmes et se hâtèrent en hurlant vers les murs d’Alésia. Mais Vercingétorix les dompta une fois encore, rit fermer les portes de la cité, força ses hommes à barder leur camp, et abandonna ses chevaux et ses morts à la victoire germanique. César, de son côté, refusa de donner l’assaut.

 

5. Vercingétorix appelle la Gaule à son secours.

 

Le proconsul ne voulait réduire Alésia que par le blocus et la famine. L’expérience de Gergovie l’invitait à la prudence. La nouvelle victoire lui donnait l’espoir de réussir. Vercingétorix avait perdu la plaine des Laumes : sa première défaite l’avait contraint à se réfugier dans Alésia ; la deuxième allait l’y enfermer. César pouvait achever sans crainte la ligne de ses redoutes, et tracer ensuite celle de ses fossés, qui séparerait les Gaulois du reste du monde. Leur sort était fixé, et s’achèverait tôt ou tard dans la faim, la mort ou l’esclavage, si la Gaule ne les secourait pas.

Mais Vercingétorix retrouvait, dans ces moments de danger, ces décisions rapides et sûres qui faisaient alors de lui l’égal de César.

Quelques routes étaient encore libres (au Nord-Ouest ?). Il fallait prévenir la Gaule du danger que courait sa principale armée, des ordres que lui donnait son chef. On se rappelle que Vercingétorix, à l’assemblée du Mont Beuvray, n’avait pas réclamé de ses nouveaux alliés un seul fantassin, sauf les troupes envoyées dans le Sud. Il restait donc d’immenses réserves d’hommes qu’il avait le droit d’appeler à son secours et à la défense de la Gaule.

Un jour, peut-être le lendemain ou le soir de la défaite, il convoqua tous les cavaliers qui avaient survécu aux deux combats, l’élite de la noblesse et des chefs. Il leur donna l’ordre de quitter Alésia dans la nuit, de se rendre dans leurs tribus et leurs cités respectives, et d’y appeler aux armes tous les hommes valides. Il tiendrait trente jours encore, davantage même, s’il rationnait les assiégés plus étroitement, et il fixa le jour auquel il donnait rendez-vous à l’armée de secours. — Ce furent de solennels adieux, une triste adjuration du chef qui restait : ceux qu’il congédiait étaient ses obligés ou ses proches ; il avait parmi eux ses plus fidèles collaborateurs, tels que Lucter, l’homme peut-être qui après lui aimait le plus la liberté gauloise. Un instant, comme s’il s’abandonnait, Vercingétorix parut songer à lui-même autant qu’à la Gaule, il fit souvenir ceux qui partaient des services qu’il leur avait rendus, il s’irrita à la pensée du sort qui lui était réservé, à ces mortels supplices dont César lui ferait payer son dévouement à la cause de tous, et il fit appel à leur zèle et à leur activité : il suffisait de quelques jours de retard pour que 80.000 hommes, les meilleurs fantassins de la Gaule, mourussent avec lui. — Enfin il les renvoya à la nuit noire, et ils s’éloignèrent en silence d’Alésia pour gagner leurs cités lointaines.

Je m’étonne qu’on ait reproché à Vercingétorix de ne les avoir point suivis pour se mettre lui-même à la tête de l’armée de secours. Il resta au poste où il y avait le plus de dangers et le plus de devoirs. Lui seul était capable d’obliger son armée à souffrir et la ville à résister. Alésia abritait les troupes les plus solides de l’infanterie gauloise : c’étaient des hommes qui le suivaient depuis le premier jour de la guerre, qui l’avaient accompagné sur tous les champs de bataille, et qui pour la plupart étaient ses sujets en Auvergne ou les clients de sa nation : il devait demeurer près d’eux pour les réserver, les diriger et les protéger au besoin. Mais Alésia garda peut-être aussi les chefs les plus réfractaires à sa volonté, les nobles éduens ou arvernes : aux premières souffrances, le roi étant là, ils parleront de se rendre ; soyons sûr que, s’il avait été loin, ils n’auraient pas attendu ce jour-là, et que Vercingétorix, venu à leur secours, aurait trouvé César victorieux dans Alésia rendue. Sa présence dans la cité était la seule garantie qu’elle résisterait assez pour arrêter le proconsul et donner à la Gaule le temps de lever sa dernière armée.

Après le départ de ses compagnons, il prépara ses soldats aux souffrances de l’incertitude et de la faim. Il s’agissait de ménager le plus possible les ressources de la place et les forces des hommes jusqu’au jour où il les ferait marcher contre les légions à la rencontre de l’armée du dehors. Il évacua le boulevard extérieur, devenu inutile puisque César renonçait à l’assaut, et il ramena toutes ses troupes derrière les remparts : l’ancien camp ne servit plus que de dépôt d’artillerie. Il fit transporter tout le blé, sous peine de mort, dans des greniers dont il prit la garde ; il répartit le bétail par tête d’homme ; il se réserva de fixer rigoureusement la ration de blé quotidienne. Cent mille hommes, entassés sur cent hectares, s’arrangèrent pour y vivre cinq semaines, dans l’obéissance au chef et l’espoir du salut (début d’août ?).

 

À suivre...

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